jeudi 4 juillet 2013

C'est pas parce qu'on a rien à dire qu'il faut fermer sa gueule

Direct Matin, dans son édition du 21 juin 2013, se penche sur les 100 premiers jours du pape François. Pourquoi pas, ça nous change des aventures des starlettes mononeuronales et des championnats du monde du dopage, dans la discipline "à l'insu de son plein gré". Passons rapidement sur les habituelles considérations pénétrantes de l'auteur du papier : le pape a lavé des pieds (quelle nouveauté), rencontré des motards (incroyable), salué la foule (pas possible), béni des fidèles (en voilà une surprise), est catholique (je n'en reviens pas) comme son prédécesseur (alors là, je suis scotché) ; il prend des décisions (non, mais j'hallucine) et il les fait appliquer (époustouflant, je ne vois pas d'autre mot).

Mais la grande révélation du jour nous vient de Caroline Pigozzi, vaticaniste avertie, interviewée par le journal. Aaahhh ! les experts médiatiques... Heureusement qu'ils sont là pour nous éclairer car sans eux, pauvres pommes que nous sommes, nous ne comprendrions rien au monde qui nous entoure. Ainsi, nous apprend-elle, le pape "a compris qu'il fallait sourire". Ah d'accord. Me voici proprement surlecuté par l'indépassable pertinence de l'analyse. Vraiment, j'insiste. Ça ne vous avait sans doute pas sauté aux yeux, et pourtant, c'est évident.

Déjà, tout jeune prêtre, Jorge Bergoglio faisait la gueule. C'est prouvé.


Quand il a été nommé évêque, ça s'est aggravé.


Cardinal, il est devenu sinistre.




Le soir de son élection, quand il est apparu au balcon, la foule s'est carrément mise à pleurer devant son air menaçant.



Du coup, les cardinaux, mesurant la boulette qu'ils avaient faite en le choisissant, ont discrètement convoqué des experts en musculation zygomatique. Installés dans les caves secrètes du Vatican auxquelles ils avaient accédé nuitamment par une porte dérobée, ceux-ci ont patiemment appris pendant des mois et des mois à Jorge Bergoglio comment sourire. Les progrès ont été lents, mais enfin, lentement, précautionneusement, soigneusement, il a commencé à sourire. 


Quand on voit les photos d'avant, ça n'a pas dû être de la tarte. Mais il paraît, c'est ce qui se murmure dans les cercles des gens bien informés à-qui-on-ne-la-fait-pas, que ce n'était pas ça le plus compliqué.

Non, le plus dur, ça a été de lui faire comprendre qu'il fallait sourire. Une source proche du dossier confirme : "Au début, le pape nous disait : 'Sourire ? Mais enfin, pour quoi faire ? J'ai jamais compris à quoi ça servait de sourire. Alors que quand ils me voient, tous, avec mon air furieux, je peux vous dire qu'ils filent doux. Ah ils connaissent pas Jorge, les mecs ! J'vais vous les travailler en férocité, moi.' Mes collègues et moi étions désespérés et nous nous demandions comment parvenir à le convaincre."

Heureusement, d'après Caroline Pigozzi, l'un des experts a fini par lui dire de s'inspirer de Jean-Paul II. Et là, nous dit-elle, il a enfin compris et admis que ça pouvait coller. Ouf.

Admettez, chers amis, que ça vous en calfate une fissure, n'est-ce pas ? Elle en sait des choses, Caroline ! Tu m'étonnes que le monde entier jalouse notre presse et notre exception culturelle.