mercredi 5 mars 2014

Si la pluie continue, les fraisiers seront en retard.

Ce n'était pas l'envie mais le temps qui me manquait pour distribuer quelques mornifles depuis octobre. Ce billet arrive d'ailleurs bien tardivement, mais comme il est écrit, je vous l'inflige.

Samedi 15 février, je suis légumé devant les JO sur France Télévision. Non, je n'étais pas en train de lire Tchekov ou Cervantes tout en sirotant un vieil Armagnac. Je sais, vous êtes submergé par la déception. Rassurez-vous, j'avais quand même coupé le son, car j'aime regarder le sport mais supporter les commentaires de Nelson Monfort, ce n'est pas du sport, c'est du masochisme.

Bref, voilà que la retransmission des JO est interrompue pour nous parler de Renaud Lavillenie, perchiste français, qui vient de battre le record du monde de Sergueï Bubka, champion du monde invaincu depuis 1994. Je dois dire qu'en cette journée de succès français, je ne peux m'empêcher de ressentir un petit frisson de fierté - que voulez-vous, on ne se refait pas. Donc, sans état d'âme, je dis bravo, incroyable, fantastique, magnifique. En un mot, cocorico. Ah la la, qu'est-ce qu'il a pas fait, Renaud, à Donetsk. Rendez-vous compte, il a battu le record du monde de hauteur en saut à la perche, à Donetsk. Sur le territoire et en présence du détenteur du titre, Bubka dit "le Tsar", qui est natif de Donetsk.

Ceci dit, le frisson de fierté a rapidement laissé place à un certain agacement. Car tout au long des jubilations journalistiques - que je plussoie, naturellement - je m'étonne qu'il ne soit question que de Donetsk. Jamais de l'Ukraine, où est située la ville de Donetsk. Une, deux, trois fois, passe. Au bout de 20 minutes sans que jamais le mot Ukraine soit prononcé, c'est un curieux hasard, mais il est vrai que le Français est mauvais en géographie. Le soir, au JT, on nous parle encore de Donetsk, mais toujours pas d'Ukraine. Le hasard fait bien les choses, n'est-ce pas ? Parce que naturellement, cette omission n'a rien à voir avec ce qui se passe en Ukraine.

Comme dans le même temps, il est de bon ton de s'offusquer de l'attribution des JO à la Russie du très vilain Poutine - déjà coupable de tout, demain condamné pour le reste -, ça fait désordre de célébrer la victoire française dans un pays secoués par des événements graves. Donc, braves gens, ça se passait à Donetsk.

Je ne sais pas si Paris valait une messe, mais incontestablement, les jeux du cirque valent bien certains silences.